Philippe Cezanne

Un constat : lorsqu’on totalise les temps de Cezanne passés à Paris (et en  Île de France) et ceux passés en Provence (les années d’enfance et d’adolescence exceptées), Cezanne séjourne un tout petit plus longtemps dans le Nord que dans le Sud. C’est dire que « Paris » représente un enjeu pictural majeur. Nous renvoyons à ce sujet le chercheur au catalogue de l’exposition Cezanne et Paris publié par la RMN en 2011 (sous la direction scientifique de Denis Coutagne)  à l’occasion de l’exposition Cezanne et Paris  mis en place au Musée du Luxembourg avec le concours du Petit Palais, Musée de la Ville de Paris (Commissaire général, Gilles Chazal, commissaires associés  Maryline Assante et Denis Coutagne).

 Paris,  les premières années (1861-1870)

« J’ai vu Paul !!! j’ai vu Paul, comprends-tu cela, toi, comprends-tu toute la mélodie de ces trois mots ?… » écrit Zola à Baille, leur ami commun en 1861.
Cezanne s’est enfin décidé à venir à Paris, surmontant l’opposition de son père et ses propres hésitations. Hors la Capitale, point de salut pour percer, réussir, faire éclater son génie à la face du monde. Zola qui pense à tout, a établi un budget pour son ami ainsi qu’un emploi du temps. Ce séjour qui débute en avril où il s’installe 39 rue d’Enfer pour se terminer par un retour plutôt précipité à Aix, en septembre, est le premier d’une longue série, s’étalant tout au long de sa vie. Pendant ce séjour de 1861, il se rend, plusieurs fois,  quelques jours à Marcoussis, près de Paris. « Depuis quelques temps je vois Cezanne assez rarement. Il travaille chez Villevieille, va à Marcoussis… » écrivit Zola à Baille le 18 juillet, puis en août « A peine arrivé à Marcoussis, Paul est venu me trouver… »
Il multiplie les aller et retour entre Paris, les bords de Seine et le Midi. A Paris, il rêve d’Aix. A Aix, il rêve de Paris. Il vient dans le Nord de la France pour échapper aux tracasseries de sa famille, puis retourne dans le Midi ; d’abord au Jas de Bouffan où il se sent protégé, puis dans les environs pour prendre un peu de distance.

Le nègre Scipion, 1867, 107x85cm, NR120, Sao Paulo, museu de Arte Le "nègre Scipion" étatitun modèle de l'atelier Suisse

Le nègre Scipion, 1867, 107x85cm, FWN422-R120, Sao Paulo, museu de Arte
Le « nègre Scipion » étatitun modèle de l’atelier Suisse

Il revient dans la Capitale en novembre 1862 et s’inscrit à l’Académie Suisse où il travaille de huit à treize heures puis de nouveau de dix neuf à vingt deux heures. Son père, Louis-Auguste, lui rend visite en janvier 1863, il loge à l’époque, impasse Saint-Dominique, probablement chez la mère d’Emile Zola. En novembre, il est inscrit sur les registres des cartes d’élèves autorisés à faire des copies au Musée du Louvre. L’adresse mentionnée est : 7 rue des Feuillantines. En décembre, il commence à copier «  la barque de Dante » de Delacroix, puis un avril 1864 « les bergers d’Arcadie » de Poussin. Il rentre à Aix en Juillet.

Le voilà de retour en mars 1865, il fait une escapade à Saint-Germain-en-Laye : « excusez-moi si je ne suis pas allé vous voir, je pars ce soir pour Saint-Germain et ne reviendrais que samedi » écrit-il à Camille Pissarro le 15 mars. En octobre, Zola rédige une introduction à son roman « Les confessions de Claude » intitulé « A mes amis P. Cezanne et J-B. Baille ». Marius Roux publie dans un article «  Mr. Cezanne est un des bons élèves que notre école d’Aix a fourni à Paris (…) grand admirateur des Ribeira et des Zurbaran, notre peintre ne procède que de lui-même ».

Portrait d'Antony Valabrègue, 60x50,2cm, NR147, Malibu, Getty Museum

Portrait d’Antony Valabrègue, 60×50,2cm, FWN425-R147, Malibu, Getty Museum

Il retourne à Aix jusqu’en février 1866. De retour, il assiste aux soirées du jeudi organisées par Zola. En avril, malgré l’intervention de Daubigny auprès d’un membre du Jury du Salon, son tableau « Portrait d’homme » (FWN425-R147) est refusé comme la plupart des envois de ses amis : Monet, Renoir, Guillemet … Paul habite alors 22 rue Beautreillis, puis de mai au début août, il séjourne à plusieurs reprises à Bennencourt ou il s’installe à l’auberge de monsieur Dumont. Il entreprend des toiles de grandes dimensions «  je pars sur-le-champ à la campagne ou je vais retrouver Paul…écrit Zola à Numa Coste le 14 juin, puis le 26 juillet : Il y a trois jours j’étais encore à Bennencourt avec Cezanne et Valabrègue. Ils y sont restés tous les deux et ne reviendrons qu’au commencement du mois prochain… Cezanne travaille… il cherche à faire des œuvres, de grandes œuvres, des toiles de 4 à 5 mètres. »

Vers la mi-août il est à Aix. Après un conflit avec sa famille durant l’automne « les plus sales êtres du monde… emmerdants par-dessus tout » On le retrouve à Paris en février 1867 où il rêve de tableaux immenses. Il rentre pour l’été dans le Midi en compagnie de sa mère, venue dans la Capitale pour visiter l’Exposition Universelle du Champs de Mars.

La rue des Saules à Montmartre, 1867-68, 31,5x39,5cm, NR131, coll.privée. La rue des Saules ne correspond à un quartier où Cezanne a habité dans Paris, mais la rue des Saules, tout près des vinges de Montmartre se situe tout proche d'una telier depeintres où Renoir, Guillaumin êingaient ( cet atelier est devenu le musée de Montmartre.

La rue des Saules à Montmartre, 1867-68, 31,5×39,5cm, FWN51-R131, coll.privée.
La rue des Saules ne correspond à un quartier où Cezanne a habité dans Paris, mais la rue des Saules, tout près des vinges de Montmartre se situe tout proche d’una telier de peintres où Renoir, Guillaumin pezignaient ( cet atelier est devenu le musée de Montmartre.

1868, fin janvier, il assiste aux « Concerts Pasdeloup » à l’ouverture du vaisseau fantôme, du Tannhäuser ainsi que du prélude de Lohengrin. Il est inscrit, de nouveau, sur les registres des demandes d’autorisation de copie au Musée du Louvre. Il habite rue Beautreillis. En avril il est encore refusé au Salon et le 16 mai il rejoint Aix. Il y reste jusqu’à la mi-décembre. Il confirme dans une lettre à Numa Coste son retour «  Je ne peux te dire au juste l’époque de mon retour. Mais je l’effectuerai très probablement dans les premiers jours de décembre, environ vers le 15. Je ne manquerais pas de voir tes parents avant mon départ et je te porterai tout ce que tu voudras. »

Début 1869, il séjourne à l’Estaque et ne retourne à Paris qu’en mars 1870. Il loge 53 rue Notre Dame des Champs. Il présente au Salon 2 peintures : le portrait d’Achille Emperaire (FWN423-R139) et un nu allongé. Ils sont refusés. Le caricaturiste Stock le croque dans un dessin le représentant avec ses deux tableaux accompagné de cette légende « Les artistes et les critiques qui se trouvaient au Palais de l’Industrie, le 20 mars dernier, jour de clôture pour la réception des tableaux, se souviennent de l’ovation faite à deux peintures d’un nouveau genre… » Cezanne ne semble pas en prendre ombrage. Fin mai, Théodore Duret, le critique d’art, désire rencontrer l’artiste, mais Zola refuse de lui donner son adresse : « Il se renferme beaucoup, il est dans une période de tâtonnements, et, selon moi, il a raison de ne vouloir laisser pénétrer personne dans son atelier. Attendez qu’il se soit trouvé lui-même »

Le 31 mai il assiste au mariage de son ami Zola, il en est l’un des témoins. En raison de la déclaration de guerre entre la France et la Prusse, il se réfugie dans le Midi au cours de l’été et séjourne à l’Estaque avec Hortense Fiquet dès septembre «  Pendant la guerre, j’ai beaucoup travaillé sur le motif à l’Estaque (…) je partageais mon temps entre le paysage et l’atelier ».Il reste caché le plus souvent à l’Estaque pendant le conflit. Il attendra que «  Paris ne fume plus ». Il n’est de retour dans la Capitale  qu’à l’automne 1871. Il s’installe chez son ami le sculpteur Philippe Solari, 5 rue de Chevreuse.

Paris,  au temps de l’Impressionnisme (1871-1882)

Bercy, la Halle aux vins photographie début XXeme siècleLe 4 janvier 1872, Hortense Fiquet donne naissance à un fils, Paul junior, au 45 rue Jussieu (2éme étage) l’artiste reconnaît l’enfant. Il charge Achille Emperaire de prévenir sa mère et l’invite à s’installer chez lui à Paris, mais les choses se passent mal entre eux. « Paul est assez mal établi. En outre un vacarme à réveiller les morts – bref je pouvais descendre ici, j’ai accepté mais après quand il y aurait de l’or je n’en ferais rien ». Il quitte Paris pour Pontoise et Auvers sur Oise.

Début 1874, il quitte Auvers pour s’installer 120 rue de Vaugirard à Paris, il demande à son père d’augmenter sa pension. Il présente 3 tableaux à la première exposition Impressionniste chez Nadar, boulevard des Capucines : La Maison du Pendu (FWN82-R202), paysage d’Auvers, étude peut-être ( V.157) et Une Moderne Olympia (FWN628-R225). Puis il rentre fin mai dans le Midi pour en revenir en septembre, toujours rue de Vaugirard.

Paris, quai de Jussieu, la Halle aux vin, 1872, 73x92cm, NR179,coll. privée

Paris, Quai de Jussieu, la Halle aux vin, 1872, 73x92cm, FWN63-R179,coll. privée

Fin 1875, Victor Choquet achète chez le père Tanguy (marchand de couleurs du peintre, il expose aussi ses œuvres) 3 tableaux de Cezanne sur les conseils de Renoir. « Aussitôt que je connus Mr. Choquet, se souviendra Renoir, je pensais à lui faire acheter un Cezanne ! Je le conduisis chez le père Tanguy où il prit une petite étude de nu. Il était ravi de son acquisition, et pendant que nous rentrions chez lui, il dit : comme cela fera bien entre un Delacroix et un Courbet ». Choquet fut le premier véritable collectionneur de Cezanne, dont il possédera jusqu’à 31 toiles. L’artiste a peint 6 portraits et plusieurs études au crayon de cet amateur.

 

 

La Seine à Bercy d'après Guillaumin, 1876-78, 59x72cm, NR293, Hamburg, Kunsthall

La Seine à Bercy d’après Guillaumin, 1876-78, 59x72cm, FWN105-R293, Hamburg, Kunsthall

Guillaumin, La Seine à Bercy, Hambourg Kunsthall.

Guillaumin, La Seine à Bercy, Hambourg Kunsthall.

 

 

Mi-février 1876, Claude Monet invite Choquet et Cezanne à déjeuner à Argenteuil, puis on retrouve l’artiste à Aix en avril jusqu’en septembre. Il fait, alors, à ses parents, un compte rendu de la seconde exposition Impressionniste qui a lieu chez le marchand Durand-Ruel. Il voit souvent Guillaumin avec lequel il travaille à Issy-les-moulineaux durant l’automne. Dans son atelier, i peint mode Cezanne, un tableau de ce dernier représentant  La Seine à Bercy..

Portrait de Vicvtor Choquet assis, 1877, 46x38cm, NR296, Columbus Gallery of art (Ohio)

Portrait de Victor Choquet assis, 1877, 46x38cm, FWN439-R296, Columbus Gallery of art (Ohio)

Fin mars 1877, il participe à un dîner organisé par les Impressionnistes au café Riche, en compagnie de Zola. Puis, en avril, il participe à la 3éme exposition Impressionniste, il y présente 13 œuvres dont 3 aquarelles. L’adresse mentionnée dans le catalogue est 67 rue de l’Ouest. Fin août il écrit à Zola qui séjourne à l’Estaque «  Je vais tous les jours dans le parc d’Issy ou je fais quelques études. Et je ne suis pas trop mal content… » puis « …j’ai changé de projet… cependant je compte toujours aller au mois de décembre ou plutôt vers les premiers jours de janvier à Aix ». Il fréquente le café de la Nouvelle Athènes, lieu de rencontre de tous les artistes, et assiste aux soirées de Nina de Villard ( fille d’un avocat, elle tenait Salon 82 rue des Moines où elle recevait peintres, poètes ou musiciens : Mallarmé, Villiers de l’Isle-Adam, Gambetta, Rimbaud, Renoir, Charles Cros ou Manet qui fera d’elle un portrait en pied intitulé : la Dame aux éventails ».

A nouveau dans le Midi, en mars 1878, il séjourne principalement à l’Estaque ou Marseille ou habitent Hortense et leur fils. Louis Auguste apprend en ouvrant un courrier adressé à son fils l’existence de sa compagne et du jeune Paul, il menace de lui supprimer sa pension. Vers la mi-février 1879, il prévient Zola de son retour vers Paris, d’où il part pour Melun début avril. Il n’est de retour que l’année suivante.

Les toits de Paris, (vus de la rue de l'ouest) 1882, 59,4x72,4cm, NR503, coll.privée

Les Toits de Paris, (vus de la rue de l’ouest) 1882, 59,4×72,4cm, FWN179-R503, coll.privée

Le 1er avril 1880 il habite 32 rue de l’Ouest. Il renonce à exposer avec ses amis Impressionnistes et se présente une nouvelle fois au Salon, encore sans succès. En mai il fait parvenir à Zola une lettre de Renoir et Monet adressée au ministre des Beaux-Arts, protestant de leur mauvais placement au Salon et lui demande de la publier dans « Le Voltaire » Au mois de juin Emile publie une série d’articles «  le Naturalisme au Salon » et il écrit à propos de Paul : « M. Paul Cezanne, un tempérament de grand peintre qui se débat encore dans les recherches de facture, reste plus près de Courbet et de Delacroix ».

Il rentre à Aix pour le mariage de sa sœur Rose avec Maxime Conil le 26 février 1881. Il ne participe pas à la 6ème exposition Impressionniste et est encore refusé au Salon. Il part donc pour Pontoise début mai. Victor Choquet achète une nouvelle toile du peintre au père Tanguy. Au cours du mois de juin, Rose et Maxime Conil viennent passer quelques jours à Paris accompagné de Marie Cezanne, il les rejoint et les accompagne pour une visite au Château de Versailles. Il retourne à Aix en octobre.

1882, début mars, il est à Paris mais ne participe pas non plus à la 7ème exposition Impressionniste, mais son Portrait de M.L.A. est admis au Salon grâce à l’appuie du peintre Guillemet. Il habite toujours 32 rue de l’ouest. L’été et l’automne le retrouvent aux environs de Paris, puis il rejoint le Midi en novembre. Il ne retourne en Île de France qu’en juin 1885. Il fait un arrêt à Paris pour dîner chez les Zola, puis se rend à la Roche Guyon. En août il est à Aix, il y reste en 1886, épouse Hortense le 28 avril et son père décède le 23 octobre.

Paris, les dernières années (1888-1905)

Il s’installe 15 quai d’Anjou et loue un atelier rue du Val de Grâce en décembre 1888.Il fait un bref séjour à Hattenville en juin 1889. A la fin du mois, il demande au comte Doria de prêter  son tableau «  La maison du Pendu à Auvers » pour l’exposition Centennale d’ Art Français organisée pendant l’Exposition Universelle de juillet à octobre. Il remercie Roger Marx, le critique d’art, pour son appuie et lui demande de transmettre ses remerciements à Antonin Proust, commissaire de l’exposition. (Roger Marx fut un des premiers à défendre Cezanne auquel il a consacré de nombreux articles. Dans l’exposition, il réservera une place d’honneur à l’artiste au grand scandale des artistes officiels et du public)

Décors peints à la demande de Choquet pour son appartemetn parisien:La Vasque au Paon (NR643, coll privée) La Barque et les Baigneurs, NR 644 (musée de l'Orangerie)

Décors peints à la demande de Choquet pour son appartement parisien:La Vasque au Paon (FWN675-R643, coll privée)
La Barque et les Baigneurs, (FWN676-R644, musée de l’Orangerie) [30x124cm]

A la fin de l’année Cezanne est exposé à Copenhague et à Bruxelles en janvier 1890. Mais il ne se déplace pas, il reste à Paris. Il réalise, à la demande de Victor Choquet, deux panneaux décoratifs pour son hôtel particulier situé 7 rue Monsigny (FWN675-R 643 et FWN676-R644). Durant l’été, il se rend dans le Doubs avec Hortense et son fils afin de régler la succession de son beau-père puis se rend en Suisse pendant quelques mois.

Il revient s’installer en septembre 1891 69 rue d’Orléans. Cezanne commence à être reconnu et de nombreux articles sur l’artiste paraissent dans les revues, Félix Fénéon, Huysmans, Georges Lecomte, Cécilia Waern lui consacrent d’élogieux commentaires.

A la fin de l’Année 1892, Ambroise Vollard découvre les œuvres de Paul Cezanne chez le père Tanguy. Le critique Gustave Geffroy, en décembre 1893, publie un article sur l’Impressionnisme avec, en première page, la reproduction du portrait à l’eau forte de l’artiste par Camille Pissarro avec cette légende : portrait du peintre Cezanne, précurseur de l’Impressionnisme.

En février 1894, le père Tanguy décède, puis le peintre Gustave Caillebotte qui lègue à l’Etat 65 tableaux de sa collection dont la plupart sont refusés et retournés aux héritiers sous la pression des peintres Académiques et de certains professeurs des Beaux-Arts qui menacent de démissionner. Grâce à l’intervention de Renoir, exécuteur testamentaire, soutenu par Martial Caillebotte, frère de l’artiste, un décret du Conseil d’Etat autorise le Comité des Musées Nationaux à faire un second choix. Ils acceptent : 7 pastels de Degas, 2 Manet, 8 Monet, 7 Pissarro, 5 Sisley, 6 Renoir et Martial Caillebotte ajoute 2 toiles de son frère. Sur les cinq tableaux de Cezanne seul deux : Cour de ferme à Auvers (FWN130-R389 ) et l’Estaque (FWN120-R390) sont finalement retenus.

portrati de Gustavve Gefroy, 1895-1896, 116x89cm, Parsi Musée d'Orsay

Portrait de Gustave Geffroy, 1895-1896, 116x89cm, FWN516-R791,Paris, Musée d’Orsay

Gustave Geffroy écrit de nouveau sur le peintre après la vente de la collection de Théodore Duret. Cezanne le remercie, il est à Alfortville. Durant l’été il s’installe 2 rue des Lions SaintPaulLe 2 mars 1895, Berthe Morisot décède alors que Cezanne et Renoir travaillent ensemble dans la campagne d’Aix, il revient à Paris pour commencer le portrait de Gustave Geffroy dans sa bibliothèque. Il y travaille jusque vers le 10 juin. Sans le terminer, il abandonne son tableau chez son modèle et quitte Paris. Fin mai, peu de temps avant ce départ, il visite en compagnie de Pissarro l’exposition consacrée aux Cathédrales de Monet chez Durand-Ruel, ils sont emballés. Il avait à l’époque un atelier rue Bonaparte. Vollard cherche l’artiste à Paris mais il est déjà parti. Son fils le reçoit et transmet à son père l’offre d’une exposition de ses œuvres dans sa galerie. Le peintre donne son accord. L’exposition a lieu en novembre. Renoir, Degas, Monet achetèrent des toiles, Pissarro fait un échange et Julie Manet, la fille de Berthe Morisot acquiert une aquarelle. Auguste Pellerin y achète sa première œuvre de Cezanne. (Il fut le plus important collectionneur du peintre, à son décès il possédait 92 peintures et 6 aquarelles)

Après un long séjour dans le midi, une cure à Vichy et un séjour d’été à Talloires, il se rend à Paris fin août 1896 à la recherche d’un atelier. Il loue un appartement 58 rue des Dames au 3ème étage, dans le quartier des Batignolles. Il écrit à Joachim Gasquet le 29 septembre : «… rentré à Paris, en quittant Talloires, j’ai consacré pas mal de jours à trouver un atelier pour y passer l’hiver. Les circonstances, je le crains fort, vont me retenir quelque temps à Montmartre où se trouve mon chantier. Je suis à une portée de fusil du Sacré Cœur dont s’élancent dans le ciel les campaniles et clochetons. » Vers la fin de l’année, le fils du sculpteur Solari, ami du peintre, lui rend visite.

Janvier 1897, alité, il ne peut recevoir le peintre Guillemet à son atelier. Son fils Paul s’occupe de son déménagement 73 rue Saint-Lazare. En février, l’annexe du Musée du Luxembourg avec le legs Caillebotte ouvre ses portes, les visiteurs se déchaînent contre les Impressionnistes. L’artiste rentre à Aix fin mai après avoir fait un séjour à Mennecy. Le 25 octobre sa mère décède.

Portrait de Vollard, 1899, 100x82cm, Petit Plais,, Musée de l Ville de Paris

Portrait de Vollard, 1899, 100x82cm, Petit Palais, FWN531-R811, Musée de la Ville de Paris

Il revient à Paris mi-janvier 1898 et installe un atelier à la Villa des Arts, 15 rue Hégésippe Moreau au 4ème étage, qu’il conserve jusqu’en 1899. Du 9 mai, et pendant un mois, Vollard organise une nouvelle exposition Cezanne de 60 peintures. Pendant l’été il travaille en Ile de France. Début 1899, pendant plusieurs mois, l’artiste travaille au Portrait de Vollard (FWN531-R811) dans son atelier de la Villa des Arts. Il confie à Emile Solari dans une lettre « Deux séances de modèle par jour viennent aisément à bout de mes forces. Et cet état de choses dure depuis plusieurs semaines. Demain dimanche, repos. » L’après midi il se rend au Musée du Louvre ou du Trocadéro et dessine des sculptures Antiques ou de Puget, ou fait de l’aquarelle en plein air. Il prétend « être ainsi tout disposé à bien voir le lendemain »
Le peintre Alfred Sisley décède le 29 janvier à Moret sur Loing, Cezanne donne une peinture pour une vente publique organisée au profit de la veuve. Le collectionneur Egisto Paolo Fabbri qui possède 16 œuvres de l’artiste, lui manifeste son désir de le rencontrer. Paul lui communique son adresse dans une lettre du 31 mai «Je ne saurais me soustraire au désir si flatteur que vous manifestez de me connaître. Le doute de paraître inférieur à ce qu’on attend d’une personne présumée à la hauteur de toute situation est sans doute l’excuse de l’obligation de vivre à l’écart. » Il écrit à à Henri Gasquet en juin : « Quand je descendrais à Aix, j’irais t’embrasser. Pour l’heure présente, je continue à chercher l’expression de ces sensations confuses que nous apportons en naissant. Si je meurs, tout sera fini, mais n’importe. Que je descende le premier dans le Midi ou que vous veniez à Paris avant moi, je me recommande à ton bon souvenir ; fais-le moi savoir et nous nous retrouverons. » Il rentre à la fin de l’été pour s’occuper de son déménagement à Aix après la vente du Jas de Bouffan, et habite rue Boulegon. » De retour fin octobre, il habite 31 rue Ballu 3ème étage. Des paysages sont exposés chez Durand-Ruel puis fin novembre, nouvelle exposition de 40 œuvres chez Vollard. Il présente aussi 3 toiles au Salon des Indépendants.

En avril 1902, Maurice Denis expose sa peinture « Hommage à Cezanne » Paul remercie l’auteur et ses amis qui ont posé. Denis lui écrit « Peut-être aurez-vous ainsi quelque idée de la place que vous tenez dans la peinture de notre temps, des admirateurs qui vous suivent, et de l’enthousiasme éclairé de quelques jeunes gens dont je suis, qui se peuvent dire, avec raison, vos élèves »
L’été 1905, son fils loue une maison à Fontainebleau pour deux mois, son père le rejoint (8 rue de la Coudre). C’est le dernier séjour de l’artiste à Paris et en Ile de France. (Lettre de Cezanne à fournisseur  datée du 6 juillet 1905).

 

Œuvres : les tableaux peints par Cezanne dans Paris intra muros sont  peu nombreux. Cezanne n’a jamais peint à l’intérieur de villes.

Sources : Isabelle Cahn ; Sophie Monneret ; Jean Arrouye ;  John Rewald : Correspondance de Cezanne