19 janvier

« Paul Cezanne » (sans accent sur le e) naît à Aix, fils hors mariage de « Louis Auguste Cesanne [sic], chapelier, âgé de quarante ans, natif de St Zacharie (Var), domicilié en cette ville d’Aix et y demeurant sur le Cours N° 55 ; lequel nous a déclaré qu’il se reconnaît père d’un enfant du sexe masculin, né aujourd’hui à une heure du matin, rue de l’Opéra N° 28, et auquel il a déclaré vouloir donner le prénom de Paul ».

Louis Auguste, né le 10 messidor an VI (28 juin 1798), a plus exactement quarante et un ans.

L’adresse du lieu de naissance de Paul, le 28, rue de l’Opéra, à Aix, est celle de la chapellerie de François Carbonnel (orthographié aussi Carbonel) et de son épouse Marie Aubert, peut-être une parente de la mère de l’enfant qui elle aussi s’appelle Aubert, où Louis-Auguste Cezanne travaille depuis plusieurs années. Le Cours, où il réside, au n° 55, deviendra cours Mirabeau par arrêté du maire du 3 novembre 1876.

La mère, Anne Élizabeth (orthographié aussi Élisabeth) Honorine Aubert, fille d’un tourneur de chaises, née à Aix le 24 septembre 1814, est âgée de vingt-quatre ans. Son nom ne sera inscrit à la fin du registre des naissances qu’à la suite de son mariage avec le père, cinq années plus tard : « Reconnu et légitimé par le mariage de ses père et mère Louis Auguste Cezanne et Anne Élizabeth Honorine Aubert, en date du 29 janvier mil huit cent quarante quatre ».

Paul Cezanne n’a jamais écrit son nom ou signé ses lettres et ses tableaux que sous la graphie Cezanne, sans accent sur le premier e de son patronyme, comme il figure sur son acte de naissance, ce qui différencie sa famille d’autres familles du nom de Cezanne. Toutefois, l’histoire a retenu pour le peintre le pseudonyme Cezanne, de son vivant, sans que l’on sache qu’il ait protesté ( à la différence de ses descendants, qui tiennent à conserver la graphie originale de leur patronyme).

Recensement, F1 ART 12, 1836 et F1 ART 14, 1852, Archives communales d’Aix-en-Provence.
Acte de naissance n° 34 de Paul Cezanne, Archives de l’Hôtel de Ville d’Aix-en-Provence, Archives départementales des Bouches-du-Rhône, centre de Marseille, registre 202 e 370 ; reproduit par Lioult Jean-Luc, Monsieur Paul Cezanne, rentier, artiste peintre. Un créateur au prisme des archives, Marseille, Archives départementales des Bouches-du-Rhône, Images en Manœuvres Éditions, 2006, 299 pages, p. 17 :

« L’an mil huit cent trente neuf et le dix neuf janvier, à quatre heures du soir, par devant nous, adjoint, remplissant par délégation de M. le Maire les fonctions d’officier public de l’état civil de cette ville d’Aix, a comparu Sieur Louis Auguste Cesanne, chapelier, âgé de quarante ans, natif de Saint-Zacharie (Var), domicilié en cette ville d’Aix et y demeurant, sur le cours, n° 55 ; lequel nous a déclaré qu’il se reconnaît père d’un enfant du sexe masculin, né aujourd’hui, a une heure du matin, rue de l’Opéra, n° 28, et auquel il a déclaré vouloir donner le prénom de Paul, la dite déclaration faite en présence des Sieurs Paul Alphonse Martin, chapellier, âgé de 28 ans, et Lucien Coussin, courtier de commerce, âgé de trente six ans, domiciliés à Aix et y demeurants, non parents du nouveau né et ont, le père déclarant et les témoins par lui requis, signé avec moi le présent acte de reconnaissance, après que lecture leur en en a été faite.

[en marge] N° 34, Paul Cezanne, reconnaissance.

Enregistré, fol. 104 verso, cahier 4. Aix le 22 janvier 1839. Reçu cinq francs cinquante centimes. Décimes compris pour duplicata, Duveyrier.

[signé] Cezanne – Martin – Lucien Coussin – Icard., adjoint.

[au bas de l’acte] « Voir à la fin du registre des naissances ».

[à la fin du registre des naissances, fol. 115, on trouve la mention qui aurait dû être faite en marge de l’acte de naissance n° 34]

Reconnu et légitimé par le mariage de ses père et mère Louis Auguste Cezanne et Anne Elizabeth Honorine Aubert, en date du 29 janvier mil huit cent quarante quatre. Mention faite en exécution de l’article 62 du code civil – Aix le vingt neuf janvier 1844. Signé Icard, adjoint. Certifié conforme, le greffier du tribunal. »

Après avoir travaillé dans la fabrique aixoise du marchand de laines Dethès, Louis Auguste Cezanne est parti à Paris apprendre le métier de chapelier. Revenu en 1825, il a d’abord travaillé dans l’atelier du chapelier Carbonnel, où il a rencontré Anne Élizabeth Aubert, ouvrière dans la fabrication des chapeaux. Ensuite, il s’est associé, avec Martin, puis aussi avec Jérôme Coupin (Marseille, 23 septembre 1810), pour reprendre la chapellerie du Cours, au-dessus de laquelle il demeure.

Après la naissance de Paul, Anne Élizabeth Aubert s’installera avec son nouveau-né chez le père de son enfant.

Contrat de mariage entre Louis Auguste Cezanne et Anne Élizabeth Aubert, 18 janvier 1844 ; Archives départementales des Bouches-du-Rhône, Centre d’Aix-en-Provence, registre 309 E 1750, acte n° 12678 ; reproduit par Lioult Jean-Luc, Monsieur Paul Cezanne, rentier, artiste peintre. Un créateur au prisme des archives, Marseille, Archives départementales des Bouches-du-Rhône, Images en Manœuvres Éditions, 2006, 299 pages, p. 24-29.
Provence Marcel, Le Cours Mirabeau, trois siècles d’histoire 1651-1951, Aix-en-Provence, éditions du Bastidon, 1953, 349 pages, p. 76 :

« N° 55.           De la Marquise de Carabas à la Plume en Or

Ici habita, enfant, le jeune Paul Cezanne. La famille descendait de notre Alpe, du bourg de Cezanne [inexact], échangé avec les escartons du Briançonnais contre la vallée de Barcelonnette lors de la paix d’Utrecht. À la plus récente paix, ces escartons eussent dû revenir à la France… L.-A. Cezanne, après avoir travaillé dans la fabrique aixoise de Dethés, marchand de laines, s’en alla apprendre le métier de chapelier à Paris. Revenu en 1825, il ouvrit atelier et magasin sur le Cours, en ce N° 55, avec Martin puis avec Coupin, travaillant le poil de lapin et la laine des moutons de Trévaresse ; on exportait les chapeaux de feutre, vieux métier aixois. L’enseigne sur le Cours portait « Cezanne et Coupin ». Les malins, à la terrasse des Deux Garçons, disaient de cette association : « Cezanne et Coupin, dix-sept vieilles bêtes ». Léo Larguier a fait naître dans cette maison Paul Cezanne. Il écrivait dans le Petit Provençal, le 21 juin 1931 : « J’aperçus au fond de mes souvenirs le vieux passage Agard où Paul Cezanne naquit à côté de son père ». Non. Paul Cezanne est né le 19 janvier 1839, rue de l’Opéra, 28, dans un immeuble qui abrite aujourd’hui un externat de demoiselles. Sa naissance est ainsi inscrite à l’état-civil : Fils de Louis-Auguste Cezanne, 40 ans, chapelier au Cours, 55, et d’Elisabeth Aubert. Fille d’un tourneur de chaises, la mère travaillait avec son frère à l’atelier Cezanne. Peu après la naissance, maman et enfant allèrent habiter chez le père. Dans la maison du Cours naîtra, deux ans plus tard, Marie Cezanne, que notre enfance a connue dévote du gros grain à Saint-Jean-de-Malte. Quand la pluie d’automne lave la façade de la maison on entrevoit encore (pour combien de temps ?) « Cezanne et Coupin, chapeaux ». »

Coquiot Gustave, Paul Cezanne, Paris, Librairie Paul Ollendorff, 1919, 253 pages, p. 12-13 :

« Rappelons que la chapellerie — en poils de lapins était alors la grande industrie d’Aix-en-Provence. Voulant aller vite, Louis-Auguste Cezanne s’associa tout de suite avec les sieurs Martin et Coupin, chapeliers. Alors les plaisantins de dire : « Martin, Coupin et Cezanne (seize ânes) font dix huit bêtes ! » Dire absurde, car les trois associés, aussi malins l’un que l’autre durent bientôt se séparer ; et le père Cezanne alla se réinstaller, c’était vers 1848, toujours sur le Courss, mais cette fois au coin de l’ancienne rue des Grands-Carmes, qu’on appelle maintenant rue Fabrot. »

RAIMBAULT Maurice : « Une lettre de Cezanne à Joseph Huot » ; Provincia. Revue trimestrielle d’histoire et d’archéologie provençales, tome 17, année 1937 ; Société de statistique, d’histoire et d’archéologie de Marseille et de Provence ; p. 249-267 (voir 4 juin 1861). Note 4 p. 253 :

« Lors de la naissance de leurs enfants les parents cohabitaient chez le père, mais pour éviter ce qui à l’époque eût causé un scandale, la mère alla faire ses couches au n° 28 de la rue de l’Opéra. »

20 février

Paul Cezanne est baptisé à l’église Sainte-Madeleine, place des Prêcheurs. Sa marraine est sa grand-mère Rose Aubert ; son parrain, son oncle Louis Aubert, chapelier.

Acte de baptême de Paul Cezanne, Archives départementales des Bouches-du-Rhône, centre d’Aix-en-Provence, registre 30 J 110, église de la Madeleine, 1839, p. 23 ; reproduit par Lioult Jean-Luc, Monsieur Paul Cezanne, rentier, artiste peintre. Un créateur au prisme des archives, Marseille, Archives départementales des Bouches-du-Rhône, Images en Manœuvres Éditions, 2006, 299 pages, p. 18-19 :

« L’an mil huit cent trente neuf et le vingt février a été baptisé par moi, prêtre vicaire de cette paroisse, soussigné : Paul Cezanne, né le dix neuf janvier, fils naturel de Louis Auguste Cezanne, chapelier, demeurant sur cette paroisse, et d’une mère non nommée, le parrain a été Louis Aubert chapelier et la marraine Rose Aubert, née Girard qui ont signé avec moi.

[signé] Louis Aubert – Cezanne – P. Armelin, official – Florens, vicaire. »