R043 Paysage 1862-1864 (FWN13)

Pavel Machotka

(Cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Pendant les trois années 1862-65, comme si sa première expérience avec la réalité concrète qu’exprime La Tour de César (R024 FWN 3) avait soulevé une chape, Cézanne fuira le conventionnel dans ses paysages et ce, à quelques petites exceptions près, de façon permanente. La touche originale de Paysage de 1862-1864 , on ne l’avait vue jusque-là que dans le tableau contemporain Jeune fille au perroquet (R026-FWN575), mais ici, la touche est plus cohérente et plus conforme à son sujet.

Paysage, 1862-1864 46 x 38 cm R043 - FWN 13

Paysage, 1862-1864
46 x 38 cm
R043 – FWN 13

Le couteau, déposant la peinture avec la partie plate de la lame, incise les troncs d’arbres, le feuillage ; et, comme dans son œuvre de la maturité, le ciel est placé sur le même plan et semble aussi solide que les arbres. Ce n’est pas seulement la touche, aussi vigoureuse soit-elle, ou bien l’idée originale de n’utiliser que le couteau qui saute aux yeux, mais l’urgence apparemment instinctive le poussant à peindre plus qu’à réaliser de simples images. Cette pulsion nous paraît ici si forte qu’elle ne peut être étanchée que par le déploiement de diagonales fébriles à partir du point où les arbres touchent le sol. Le tableau n’est pas une simple représentation de la scène qui se présente à nos yeux mais un objet à part entière, autonome et renvoyant à lui-même. Bien qu’il reste probablement très fidèle à son motif, comme tous les paysages dont nous connaissons le modèle, peu importe de savoir jusqu’à quel point. La toile tire sa force du traitement convaincant de la peinture. Certes, l’épaisseur de la couche de peinture contribue à rendre la substance, mais il ne s’agit pas que de cela : après tout, nous recevons de la même façon les huiles fines du milieu des années 1880 ainsi que les aquarelles, encore plus fines. Ici nous nous trouvons face à une manière décisive et une vision cohérente.

Adapté de Pavel Machotka, Cézanne: La Sensation à l’oeuvre.