R549 – La Bastide La Durane dans la plaine de Valcros III 1885-1886 (FWN218)

Pavel Machotka

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La Bastide La Durane dans la plaine de Valcros III vers 1885-1886 54 x 73 cm R549 FWN218

La Bastide La Durane dans la plaine de Valcros III vers 1885-1886
54 x 73 cm
R549 FWN218

Dans Arbres et maisons la maison visible à travers les arbres est parfaitement verticale et sert de point stable en pleine tempête de branches. Cela calme une toile qui aurait eu du mal à se poser ; ou, en d’autres termes, en nous permettant de retourner dans un havre de calme quand on en a besoin, il nous laisse faire l’expérience des volutes des branches ondulantes en toute liberté. Contrairement au tableau des Arbres et maisons (R550) celui-ci est moins impulsif et plus formel. Il a un espace plus profond, dans lequel les plans proche et lointain ont la même importance, et les plans sont subtilement réunis par un chemin ondulant. Ce qui apparaît entre les branches ne doit donc pas être découpé, et il faut que le plan lointain reste continu,  pour rester un point stable de répit contre le premier plan.

Si le but de ce tableau est la relation entre les deux plans, la peinture du premier plan en représenta le défi technique. Les branches sont enchevêtrées et se chevauchent en des modalités complexes, et techniquement, il s’agit de les représenter de telle sorte qu’elles traduisent la progression des troncs solides jusqu’aux textures en filigrane sans confusion. Cézanne l’accomplit en donnant aux troncs des contours nets en un seul trait – unique mais interrompu, pour qu’ils ne paraissent pas découpés du fond – et progressivement en le redoublant quand il atteint les branches ; ceci produit une impression de vague, un sentiment de mouvement, et l’effet de filigrane, tout à la fois. Là où les branches se chevauchent, il les sépare vigoureusement, laissant la branche de devant continue et celle de derrière divisée par un grand vide. Peindre ces branches représente en fait beaucoup de travail : lever les yeux de son chevalet, changer de centrage et d’échelle, et trouver rapidement l’endroit que l’on avait regardé en dernier, tout cela demande beaucoup d’engagement. Nous savons, cependant, d’après un tableau de branches en hiver qu’il a fait à partir d’une photographie en 1879 ou 1880 (R413) qu’il n’éludait ou simplifiait sa tâche. Et c’est la touche avec laquelle le tronc est rempli qui a de l’intérêt ici : elle s’accumule entre les contours en petites taches, soit parallèlement aux contours ou en oblique, et c’est ainsi qu’elle produit le volume, les changements de couleur, et la texture qui donne aux troncs leur substance et leur intensité noueuse.

 

Source: Machotka, Cézanne: La Sensation à l’oeuvre.

NB : Le catalogue en ligne donne à ce tableau le titre suivant, moins précis : Arbres et maisons au lieu dit « La Durane »

Voir aussi R548-FWN219 et R550-FWN220.

Une étude de localisation précise a été consacrée à ces trois tableaux et à l’aquarelle correspondante : Localisation de Arbres et maisons (FWN218 à 220-R548 à R550, RW156)