R842 – La Grosse Poire, 1895-1898 (FWN865)

Pavel Machotka

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La Grosse Poire, 1895-1898
44.5 x 54.6 cm
R842 – FWN865

Malgré toutes ses innovations de composition, Pommes et oranges (R847) a une touche conservatrice. Par comparaison, un tableau plus petit comme La Grosse poire est plus radical, Cézanne utilisant une touche moins précise, faisant ressortir des oppositions simples de couleurs et expérimentant des arrangements bizarres. Parce qu’il utilise le genre de pigment liquide que nous avons vu dans les paysages et les portraits du tournant du siècle, on devrait le dater des alentours de 1900 ou plus tard. C’est son utilisation de la couleur qui nous frappe en premier : l’emploi du cobalt pour le bord de l’assiette, dans les contours des fruits et les ombres qu’ils projettent. C’est comme si toute la moitié inférieure de la toile avait été conçue comme une opposition de couleurs, des bleus froids contre les marrons, les oranges et les jaunes, et cette opposition est ce à quoi je reviens toujours, même quand je suis inévitablement distrait par le puissant dessin floral du paravent du fond. Celui-ci déstabilise la composition ; bien que plat, il montre des volumes et il est fait pour occuper le même espace profond que les fruits ; il produit ce qui ressemble à une explosion au-dessus des pommes et des pêches parfaitement calmes. Les traits se dirigeant vers le haut à gauche équilibrent le bord droit de la table, bien sûr, tandis qu’une des feuilles lui est parallèle, c’est ainsi que la composition s’harmonise et se stabilise à nouveau, mais en ajoutant ces mouvements et ces complexités, Cézanne a une fois de plus joué avec les limites de la nature morte (comme il l’avait déjà fait avec moins d’audace dans Le Plat de pommes).

 

 

Source: Machotka, Cézanne: La Sensation à l’oeuvre.