R735 – Pot de gingembre, 1892-1893 (FWN839)

Pavel Machotka

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Pot de gingembre, 1892-1893
46.5 x 55.5 cm
R735 – FWN839

Le plus complexe des trois tableaux et le mieux réalisé, c’est Pot de gingembre. C’est un arrangement formel d’objets d’origine (mais bien plus nombreux), avec l’espace encadré au-dessus par la draperie et sur la gauche par une table avec des livres dessus ; le livre le plus haut est au niveau de l’œil du peintre, et tout le reste est en dessous. Ceci produit l’étrange effet que nous voyons dans Nature morte aux aubergines, avec soit la table chantournée placée haut ou la nature morte tout à fait bas, mais nous voyons bientôt quelle en est la nécessité. Avec une draperie en encadrement, le pot de gingembre devait être placé bas dans la composition, trop bas pour dominer la nature morte comme il le fait ordinairement, et Cézanne devait trouver une manière de l’enfermer dans d’autres formes. Les livres lourds placés bien au-dessus, et les ondulations de la draperie qui tombent vers elle à la fois la limite et l’incorpore. Ce qui maintenant devient apparent c’est la continuité d’objets solides du haut en bas sur le côté gauche, plutôt que la domination d’un objet quelconque. Cela nous aide à voir la toile comme un ensemble et à en noter les multiples résonances : par exemple, le bout de la draperie en haut à droite descend vers la raie rouge du torchon, et sa forme en large V fait écho au grand V du pot de gingembre, ou les deux rappellent le V identique du torchon (formé sur la gauche par un pli et sur la droite par la rayure rose). Nous sommes censés remarquer aussi, je pense, le bord cassé de la table ; il suit le mouvement du livre dont l’angle s’avance vers nous, et indique la plinthe en bas à droite.

Tout ceci a été rendu possible par un changement dans la lumière. Cézanne déplaça la table pour qu’elle soit éclairée par la droite, la lumière plus forte accusant ainsi tous les objets. Ceci aussi modifia les ombres sur le torchon et exigea la rayure rose; et avec le point de vue plus distant adopté par le peintre le tableau se trouve fondé sur une richesse d’objets presque précaire mais parfaitement équilibrée.

 

Source: Machotka, Cézanne: La Sensation à l’oeuvre.