R807 – Portrait de fillette, vers 1896 (FWN519)

Pavel Machotka

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Portrait de fillette
vers 1896
R807-FWN519

Avec un portrait d’une petite fille, Cezanne s’oriente vers un style plat, plus dépouillé au service de l’impression de simplicité et de candeur qu’il cherche à produire. Ici, il n’ a pas à faire de mise en scène dramatique ou psychologique. La fillette pose frontalement et elle est peinte avec un modelé minimal, la masse simple du corps et les ovales répétés s’affirment le plus calmement possible. et pourtant ce portrait produit une impression extraordinaire. Le personnage semble parfaitement se suffire à lui-même et il possède une autorité que nous n’associons pas normalement à un enfant. La tête est lumineuse, en contraste avec le fond et la robe. On remarque d’abord combien la couleur la sépare magnifiquement de l’apparent fond neutre, et en y regardant de plus près, on voit que le visage et le fond  possèdent en fait beaucoup de teintes en commun ; vert gris et violet gris y apparaissent également, comme les carmins sombres. On voit assez vite la robe et le mur apparemment neutres se diviser en leurs composantes de couleur, à savoir, bleus, bleus gris et ocres gris, ainsi que des verts et des violets. Pour la couleur, donc, dans ce tableau une unité profonde va de pair avec un radieux contraste. Sa forme non plus n’est pas aussi simple qu’elle le paraît d’abord. La tête est allongée vers le haut à gauche (une technique remarquée dans le Portrait d’Antony Valabrègue de 1866) et une touche de cramoisi est même introduite au-dessus de la tempe droite ; ceci produit une asymétrie tendue dont l’extension entière ne peut qu’être vue dans un miroir. Complètement dépouillé d’intensité dramatique, le portrait repose entièrement sur des moyens formels pour son expression, et en cela semble d’autant plus réussi.

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With a portrait of the head and shoulders of a little girl, Cézanne turns to a flat, plain style that carries the desired suggestion of simplicity and candidness. Here, he has no dramatic or psychological presentation to make. The girl is posed frontally and painted with a minimum of modeling, and the simple mass of the body and the repeated ovals make the calmest possible statement. But these few words fail to convey the extraordinary impression that the portrait makes. The figure seems perfectly self-sufficient and carries an authority we do not normally associate with a child. The head is luminous against the background and the dress. We first notice how beautifully its color separates from the apparently neutral background, and as we look longer, we see that the face and the ground in fact have many hues in common; grey-greens and grey-violets appear in both, as do dark crimsons. We soon see the apparently neutral dress and wall divide into their color components, that is, into blues, grey-blues and grey-ochres as well as the greens and violets. In color, then, the painting is as deeply unified as it is radiantly contrasting. Nor is its form as simple as it appears at first. The head is elongated toward the upper left (a device seen in the 1866 Portrait d’Antony Valabrègue), and even a touch of crimson is introduced above the right temple; this produces a tense asymmetry whose full extent can only be seen in a mirror. Completely deprived of drama, the portrait relies purely on formal means for its expression, and seems the greater for it.

Source: Machotka, Cézanne: the Eye and the Mind.