R876 – Portrait de Paul Cézanne, vers 1895 (FWN517)

Pavel Machotka

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Portrait de Paul Cézanne
vers 1895
R876 – FWN517

Dans son autoportrait daté de 1894 – à en juger par son apparence, comme le fait Ratcliffe[1]– Cézanne se voit comme un être énergique, bien en chair et peut-être rusé ou soupçonneux, ou à tout le moins dramatique : il change ses sourcils normalement plats en d’alertes circonflexes, comme dans le portrait de 1872 (Portrait de l’artiste), et nous cherche du regard intensément. L’œil droit est profondément installé dans son orbite et la paupière pleinement modelée, si bien qu’il n’y a aucun doute quant au point où notre regard se fixera ; le revers et l’épaule gauches sont supprimés par une couche de blanc, si bien que le menton se projette agressivement par-dessus le buste. C’est une pose, bien sûr, et une pose bienvenue, mais c’est sa touche qui finalement nous séduit : ici ou là, Cézanne a frotté la surface, ailleurs il a utilisé des hachures parallèles, et partout créé une surface animée et des contrastes violents entre les verts, les bordeaux et les tons chair. La dernière couche atténue la frontière entre le visage et le fond, ce qui fait que la tête semble hésiter entre se projeter en avant ou reculer, elle reste suspendue dans l’espace juste assez pour créer du mouvement plutôt que de s’immobiliser.

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In his self-portrait dated about 1894—to judge from his appearance—Cézanne sees himself as a vital being, fleshy and perhaps wily or suspicious, or in the very least dramatic: he turns his normally flat eyebrows into alert circumflexes, as in the 1872 portrait (Portrait de l’artiste), and looks out at us intently. The right eye is set deep in its socket and its eyelid is fully modeled, so that there is no question about the point at which our gaze will be held; the left lapel and the left shoulder are suppressed by white overpainting, so that the chin juts out aggressively over the torso. It is a pose, of course, and a welcome one, but it is his touch that ultimately engages us: here and there it is scumbled, elsewhere hatched in parallel strokes, and everywhere it creates animated surfaces and dramatic contrasts between the greens, the burgundies, and the flesh tones. The overpainting loosens the boundary between the face and the background, and the head as a result oscillates between jutting out and settling back, remaining suspended in space just enough to create movement.

 

[1] Dans son Cézanne Cézanne’s working methods, p. 21.

Source: Machotka, Cézanne: the Eye and the Mind.