Un « essai » peu ordinaire, à mi-chemin entre le roman et le récit historique, qui offre un point de vue littéraire sur le peintre – ce qui est plutôt rare, alors que les interprétations philosophiques ou psychologiques abondent…

Le livre est à paraître chez Flammarion le 13 septembre 2023.

Voici ce qu’en dit l’auteur elle-même :

« Des toits rouges sur la mer bleue.
Les mots sont de Cézanne, dans une lettre écrite à l’ami Pissarro le 2 juillet 1876 ; Cézanne est à l’Estaque, il a trente-sept ans et il peint.
L’Estaque, le corps des pays, les étés, les saisons, le rouge inépuisable, sa brûlure, et la peinture à l’épicentre du séisme vital.
La vie de Paul Cézanne serait un long, lent et sûr séisme peinturier.
Je ne raconte pas la vie de Cézanne, je ne fais pas le tour de sa peinture, je ne suis ni biographe, ni spécialiste. Je prends des chemins buissonniers, je flaire, je palpe, je tâte. Je rumine des moments, le matin du mariage de Paul Cézanne, le jour de la mort de sa mère, ses dernières heures à l’atelier des Lauves, un soir d’été à Auvers sur Oise en août 1873 ou quelques heures immobiles, au creux d’un après-midi de novembre 1874. Le père de Cézanne, sa mère, sa femme, Hortense, et le jardinier Vallier ou le Docteur Gachet tournent avec moi autour du corps du peintre au travail, autour de ses gestes, de sa démesure, de son ardeur.
Il sera question d’une échelle et d’un atelier fendu, il sera question de lumière, d’amitié, de sous-bois, de Flaubert et de Zola, d’oreilles et de pommes, de solitude, d’Aix et de Paris, de Paris et d’Aix, de pantoufles et de confiance.
Il sera question de silence. »

Et voici une critique littéraire parue le 28 août dernier par Audrey Le Roy dans Les univers du livre :

Marie-Hélène Lafon : ruminations cézaniennes
J’ai relu Giono, après avoir lu CézanneDes toits rouges sur la mer bleue de Marie-Hélène Lafon. Mais pas n’importe lequel, cet ensemble de contes et nouvelles où Giono nous parle de paysages mais surtout aussi « de beaux artisans » : « Le rémouleur, le potier, le boucher des petits villages, le fontainier, le cordonnier », L’Eau Vive.
Je n’ai pas tout de suite fait le lien entre le fait de fermer le livre de l’autrice de nombreuses fois primée (Goncourt de la nouvelle en 2016 pour Histoires ; grand prix de la SGDL en 2020 pour l’ensemble de son œuvre ; Renaudot en 2020 pour Histoire du fils, pour ne citer que les plus récents) et celui de ressentir l’envie, le besoin, de relire ce Giono… c’était pourtant évident.
La Provence, les paysages, les artisans, l’artiste, la beauté des mots sur les choses simples, la poésie, autant de points communs aux deux titres. Oui, il y a du Giono chez Marie-Hélène Lafon. Elle, d’habitude si proche de son Cantal natal, nous emmène en Provence rencontrer son Cézanne. Enfin, je dis son Cézanne, je devrais dire le sien et celui de ceux qui l’ont côtoyé.
Je lis sur la quatrième de couverture, « cet essai ». Est-ce un essai ? Rien n’est moins sûr. Ni essai, ni biographie, ni fiction, juste un livre qui nous parle d’une certaine idée qu’à une femme, une écrivaine, d’un homme, d’un artiste.
L’autrice prend ici souvent la plume comme pour justifier son envie d’écrire sur Cézanne, « Rilke, Ramuz, Juliet, Sollers, Handke et d’autres, assurément, dont j’oublie le nom, ont écrit sur Cézanne. C’est écrasant et j’ai une longue expérience de cette sensation d’écrasement culturel, qui ne m’empêche toutefois pas de faire ce que je crois avoir à faire », mais il n’est point besoin de croire, vous pouvez être sûre, quel bonheur en ces temps troubles de lire des choses simples mises en lumière par des beaux mots.
Car la trame est simple, terriblement simple, nous faire un peu mieux connaître le peintre en faisant parler ses proches. Son médecin qui « donnerait tout pour le voir peindre dans la grande lumière des jours, attraper son geste, le surprendre », sa mère, inquiète que les tableaux du jeune Paul Cézanne ne se vendent pas « enfant, enfant, songe à l’avenir, on meurt avec du génie et l’on mange avec de l’argent », son père, sa femme, son jardinier. Autant de différentes visions, de différents attachements.
À lire – Marie-Hélène Lafon donne tous ses manuscrits à la BnF
Simple et touchant, beau et poétique. La sérénité de la Provence où tout n’est pas toujours rose mais où, comme disait le chanteur, la misère semble moins pénible. Enfin, la misère… Cézanne ne l’a pas vraiment connu et Marie-Hélène Lafon de gentiment critiquer son sujet, en le comparant à une autre de ses études, Flaubert : « L’un [Flaubert] exécra, vilipenda et railla les bourgeois de Rouen, l’autre [Cézanne] ceux d’Aix, mais l’autre et l’un furent des héritiers cossus, nantis de domestiques zélés, tôt délivrés par le travail de la génération qui les avait précédés de la nécessité de perdre leur temps à gagner leur vie. »
Le 13 septembre prochain, quelque part entre le « métro boulot dodo » qui après les vacances aura inexorablement repris son rythme lancinant, allez rendre visite à votre libraire pour vous mettre quelque temps encore à l’abri des toits rouges sur la mer bleue.
(Source : ActuaLitté (www.actualitte.com))

https://actualitte.com/article/113141/avant-critiques/marie-helene-lafon-ruminations-cezaniennes