R201 La Maison du père Lacroix, Auvers-sur-Oise, 1873 (FWN77)
Pavel Machotka
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La Maison du Père Lacroix, Auvers-sur-Oise, pourrait au premier abord sembler s’acharner à produire un effet semblable de confinement ; il laisse la maison en question apparaître derrière le feuillage. Mais en réalité il est différent d’un Pissarro : c’est un tableau où la gestion de l’espace et l’équilibre des diagonales sont essentiels. La maison ici n’est pas seulement révélée ; elle s’impose à nous avec le mur clair et la fenêtre noire s’avançant et atténuant les arbres qui l’enserrent. Ce renversement, cette poussée vers l’avant, devient le sujet du tableau et son point central[1]. La fenêtre elle-même est située au centre exact du tableau et arbitre des tensions opposées : elle aide à résoudre la pression vers la droite des toits (et de l’arbre court qui se penche) et l’inclinaison vers la gauche des murs et de l’arbre de droite. Un petit détail confirme que c’est le souci de Cézanne : il peint les lattes de la barrière comme si elles continuaient dans l’eau, parallèlement au grand arbre, quand en fait elles devraient être réfléchies. Nous ne sommes pas nécessairement censés remarquer de tels détails mais comprendre leur effet, et la technique de Cézanne exige qu’ils soient justes pour que le tableau fonctionne comme un ensemble. Le tableau est bien sûr gai, le matin est joyeux et les couleurs forment un équilibre heureux de rouges et de verts – mais nombreux sont dans le monde les tableaux gais dont tout l’effet, contrairement à celui-ci, ne repose que sur une simple gaîté.
Adapté de Pavel Machotka, Cézanne: La Sensation à l’oeuvre.
[1] Pour une photographie de la maison dans la même lumière matinale, voir ci-dessus dans mon Cézanne: Landscape into Art, p. 40.
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