R718 – La Route en Provence, 1890-1892 (FWN277)
Pavel Machotka
(Cliquer sur les images pour les agrandir)
Si la cohérence splendide des toiles de Cézanne doit sa force en partie au rythme de leur surface, ce rythme peut être créé ou bien par la touche, comme dans le remarquable Maisons en Provence (la vallée de Riaux près de l’Estaque), ou bien se trouver présenté par le site même, comme dans La Route en Provence. Dans ce dernier cas, il serait superflu, même nuisible, d’imposer un rythme secondaire du pinceau à ce qui faisait déjà la force du sujet.
On peut supposer que l’élan pour peindre La Route était donné par les ombres des rochers bordant la route[1], qui à un certain moment, en fin d’après-midi, étaient parallèles aux failles des rochers de gauche ; une progression douce de lignes obliques traversait la surface de gauche à droite. Une maison dans le fond, et le bord d’un ou deux champs, portaient le rythme oblique dans le coteau. Ce rythme inscrit sur la toile, il n’y avait pas grand chose d’autre à ajouter que des touches simples, droites, pour représenter les rochers ; et dans les quelques arbres dispersés en bosquets au-dessus, Cézanne pouvait retourner à quelque chose comme la touche parallèle utilisée plus tôt. Ici, à la maîtrise de l’économie du tableau, au rendu naturel du paysage, il faudrait ajouter ce doux équilibre qu’il a respecté entre le tournant ascendant de la route et les courbes descendantes des collines – à ne pas parler de l’harmonie subtile entre les ombres grises et les et les ochres rouges.
Source: Machotka, Cézanne: La Sensation à l’oeuvre.
[1] Ceci est certainement la route est-ouest aux Lauves, au nord d’Aix, et Cézanne regarde le nord. On a beaucoup construit dans la région et, aujourd’hui, il n’y aucun espoir de retrouver le site que Cézanne a peint ; si ce groupe de rochers existe toujours, il est vraisemblablement intégré dans les constructions environnantes.