R133 – Paysage provençal, vers 1870 (FWN 52)

R134 – Le Village des pêcheurs à l’Estaque, 1867-1869, peut-être 1870 (FWN 49)

R157 – La Neige fondue à l’Estaque – Les Toits rouges, vers 1870 (FWN 53)

R168 – La Route de forêt, vers 1870 (FWN 56)

Pavel Machotka

(Cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Ce n’est que rarement que le style de Cézanne reflète une humeur – qu’elle soit celle du peintre ou celle que son style produit, mais les coups de pinceau larges associés aux couleurs lugubres de bon nombre de tableaux réalisés en 1870 pourraient bien être une exception ; parmi lesquels quatre paysages qu’il est difficile de percevoir autrement que comme troublants. Leur turbulence n’affecte pas seulement la touche mais l’espace qu’ils créent.

Le fameux La Neige fondue à l’Estaque (R157) est boueux et démoralisant, c’est une « image effrayante d’un monde qui se dissout, en chute libre[1] » ;

R157 La Neige fondue à l'Estaque - Les Toits rouges, vers 1870 73 x 92 cm R157 FWN53

La Neige fondue à l’Estaque – Les Toits rouges, vers 1870
73 x 92 cm
R157 FWN53

Photo Pavel Machotka Cézanne: Landscape into Art, second edition, Prague, Arbor Vitae, 2014

Photo Pavel Machotka
Cézanne: Landscape into Art,
second edition, Prague, Arbor Vitae, 2014

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Adapted from Pavel Machotka, Cézanne: Landscape into art : « Of all of Cézanne’s landscapes, La Neige fondue à l’Estaque (Les toits rouges), is the most unsteady, unanchored and cheerless. Its effect on our emotions is surely calculated, but its awardly sliding composition also corresponds to the site as Cézanne saw it. He himself was perched somewhat precariously on the hillside and might have referred indirectly to his own situation in portraying the scene’s instability; in any case, he did see a bit of the viaduct and three houses standing alone in the center. (The viaduct was narrower at the time and barely visible behind the snow-covered slope.) For want of neighbors, the houses stood out, providing the one visual anchor to the composition, but Cézanne did relatively little else to keep matters in balance; only the sweeping touches in the sky, which oppose the slide of the snow downhill, mitigate the shaky asymmetry. »

Paysage provençal (R133) est presque tout gris et son espace vole en éclats ;

R133 Paysage provençal -- Rochers à l'Estaque -- Masures sous la neige, vers 1870 59 x 78 cm R133 FWN52

Paysage provençal — Rochers à l’Estaque — Masures sous la neige, vers 1870
59 x 78 cm
R133 FWN52

La Route de forêt (R168), bien qu’ensoleillé, manque d’énergie et n’arrive pas à se poser ;

La Route de forêt, vers 1870 53.7 x 65 cm R168 FWN56

La Route de forêt, vers 1870
53.7 x 65 cm
R168 FWN56

enfin, Le Village des pêcheurs à l’Estaque (R134), semble incapable de trouver son centre.

Le Village des pêcheurs à l'Estaque, 1867-1869, peut-être 1870 42 x 55 cm R134 FWN49

Le Village des pêcheurs à l’Estaque, 1867-1869, peut-être 1870
42 x 55 cm
R134 FWN49

Photo Pavel Machotka Cézanne: Landscape into Art, second edition, Prague, Arbor Vitae, 2014

Photo Pavel Machotka
Cézanne: Landscape into Art,
second edition, Prague, Arbor Vitae, 2014

Photographie Pavel Machotka ?

Photographie Pavel Machotka ?

 

 

 

 

 

 

 

Dans celui-ci, par exemple, que doit-on regarder ? les bateaux de pêche au loin ? les toits de tuiles ? la rue entrevue derrière la barrière enchevêtrée du premier plan ? Et, dans le cas où la question est censée rester sans réponse, peut-on au moins être guidé d’un point à l’autre ? On dirait que non ; on nous laisse errer. Plus aucune question de compétence ne se pose, bien entendu ; plutôt un trouble, une atmosphère ou plus vraisemblablement l’imposition délibérée d’un style conçu pour évoquer une humeur, semble être au travail ici. En tout cas, ce trouble affecte aussi plusieurs tableaux narratifs d’à peu près cette année-là : Le Meurtre (R165 FWN613), La Tentation de Saint Antoine (R167 FWN611) et Le Déjeuner sur l’herbe (R164 FWN610), et aussi Les Voleurs et l’âne (R163 FWN612) et Pastorale (R166 FWN609).

Pavel Machotka, Cézanne: La Sensation à l’oeuvre.

 

[1] Gowing, Cézanne: The Early Years, p. 166. Le tableau est fidèle au site mais l’effet qu’il produit est bien plus étourdissant. Le site fut découvert par Xavier Prati et Georges Raynaud; communication personnelle.