Le Lac d’Annecy – Talloires
texte rédigé par Philippe Cezanne sur la base de documents réalisés par Isabelle Cahn, John Rewald, Sophie Monneret
Historique
Le site privilégié de Talloires a certainement été habité depuis de nombreux siècles. A l’époque romaine, la « via Consularis » reliant Milan à Strasbourg, gagnait Genève par Faverges en longeant le lac par l’une ou l’autre des rives. En 866, Lothaire II, arrière-petit-fils de Charlemagne, en fit don à sa première épouse Thiberge lorsqu’il la répudia. Durant son long exil, elle fit édifier une « Cella », une chapelle ainsi que quelques abris ouverts aux moines errants qui marchaient à l’aventure. Certains s’y établirent et construisirent des cellules qui formèrent l’embryon d’un petit monastère. 150 ans plus tard, le domaine de Talloires fut rattaché à l’abbaye de Savigny par le Roi et la Reine de Bourgogne. Le premier prieur édifia en quelques années, avec l’aide des habitants, une église, aujourd’hui disparue, ainsi que des bâtiments pour le logement des moines. En 1674, le pape Clément X donna à l’abbaye de Talloires le titre d’Abbaye Royale. Dès cette époque et jusqu’à la révolution qui atteignit Talloires en juillet 1792, les moines, véritables seigneurs féodaux, menèrent une vie dissolue qui provoqua un esprit de révolte parmi la population. Au cours de la révolution le clocher de l’église s’effondra (la rumeur raconte que les cloches gisent encore au fond du lac) et 700 ans d’archives furent brûlées sur la place des marronniers, face au lac. Les ruines de l’église furent rasées en 1833. Quant à l’Abbaye, elle fut transformée en hôtel quelques années avant le séjour de Paul Cezanne en 1896.
Cezanne à Talloires
Après une cure à Vichy au début de l’été 1896, et sur l’insistance de sa femme et son fils, l’artiste passa les mois de juillet et d’août à l’hôtel de l’Abbaye à Talloires, au bord du lac d’Annecy. Contrairement à ses habitudes, il semble qu’il y peignit peu et la plupart des aquarelles attribuées avec plus ou moins de certitude à ce séjour sont restées dans un état assez esquissé. Les chambres de l’hôtel, anciennes cellules de moine, n’offraient guère le moyen de travailler commodément. De plus, elles n’ouvraient pas directement sur le lac mais sur une galerie entourant la cour intérieure.
Il semblerait aussi que la configuration du lac et des montagnes environnantes qui se dressent presque immédiatement sur ces rives a, peut-être, gêné l’artiste dans sa quête de motifs. Leur hauteur et leur proximité le rendant quelque peu claustrophobe.
Témoignages
Lettre à Philippe Solari , Talloires 23 juillet 1896 : Quand j’étais à Aix, il me semblait que je serais mieux autre part, maintenant que je suis ici, je regrette Aix. La vie commence à être pour moi d’une monotonie sépulcrale […]Pour me désennuyer je fais de la peinture, ce n’est pas très drôle, mais le lac est très bien avec de grandes collines tout autour, on me dit de deux mille mètres, ça ne vaut pas notre pays, quoique sans charge ce soit bien.
Durant son séjour, Cezanne exécuta :
Le lac d’Annecy :
L’enfant au chapeau de paille :
Aquarelles : RW480 à 483
dessins : C1085 – C1173
Ce jeune enfant serait, d’après nos informations, le fils d’un jardinier de l’hôtel, monsieur Vallet. (cf. Mme Jacqueline Perret, propriétaire de l’hôtel de l’Abbaye et descendante directe du propriétaire à l’époque de Cezanne).